L’empreinte de Daido Moriyama

Lorsque j’ai pris cette photo, j’ai immédiatement repensé au travail de Moriyama.

Daido Moriyama a laissé son empreinte dans le milieu artistique. Mais son style photographique reste très controversé. Nous sommes nombreux à ne pas comprendre son univers. Je ne sais pas non plus qu’elle est son intention. J’ai pourtant lu des articles à son égard et écouter plusieurs interviews mais je ne suis pas sûr qu’il ait une réelle démarche. En tout cas, il ne prétend pas vouloir faire de l’art. Il capture ce qui l’intéresse avec des snapshots. Ses images sont bancales, trop contrastées, sales… Elles ne respectent aucun code.

Je regarde ses ouvrages depuis une quinzaine d’années et j’avoue avoir mis du temps avant d’adhérer à cette photographie atypique. Mais petit à petit, j’ai commencé à apprécier sa manière d’explorer les rues de Shinjuku, l’un des nombreux arrondissements de Tokyo. Je ne peux pas dire que les photos du maître soient pour moi une source d’inspiration mais elles m’ont permis de réaliser que je n’avais pas besoin de faire passer un message à travers un projet documentaire bien construit pour m’épanouir dans la photographie. Je n’ai pas non plus besoin de me ranger dans une catégorie, d’être classé photographe de portrait, photographe de rue ou je ne sais quoi. Lorsque j’ai compris cela, c’était comme une délivrance.

Daido Moriyama secrets photography

Les images de Moriyama me fascinent. Elles ne me plaisent pas toutes mais elles me touchent. Les textures sont exagérément mises en évidence alors que d’autres parties de l’image sont effacées par les hautes lumières ou disparaissent dans le noir total. Les photos plus récentes n’ont malheureusement pas la même saveur. Elles sont trop lisses, trop propres. Je ne vous l’ai jamais dit mais ce qui me plaît le plus dans la photographie noir et blanc c’est la texture des noirs et des gris et comment les matières apparaissent sous le grain de la pellicule. C’est aussi l’une des raisons qui me font préférer l’argentique au numérique, trop lisse et trop parfait. Ce point est important parce qu’il détermine mes choix encore plus qu’avant. Le sujet n’a plus d’importance, la technique non plus mais la matière oui.

Daido Moriyama a d’une certaine manière influencé ma vision de la création photographique mais je n’ai jusqu’à présent jamais osé aller dans les extrêmes comme lui. C’est aussi ce qui fait la force de ses créations. Il a laissé un trace indélébile dans mon imaginaire.

Fondation photo Daido Moriyama : site web officiel

DAIDO MORIYAMA Memories of a Dog Revised Version

J’ai pris cette photo d’une usine le long du Canal de La Marque à Marcq-en-Barœul. Le soleil brillait. La scène était déjà très contrastée naturellement mais l’ajout du filtre jaune devant l’objectif du Nikon FM2n a renforcé cet effet.


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Commentaires

13 réponses à « L’empreinte de Daido Moriyama »

  1. Bonjour Fred, parfois, au détour d’une lecture, d’une exposition, d’une rencontre, un petit quelque chose semble se rompre, ou se mettre – enfin – en place. Souvent, le plus difficile, c’est de s’en rendre compte, de l’accepter. Mais ensuite, quelle délivrance, quel bonheur. C’est sans doute ce que Daido Moriyama a révélé en toi. Avec toute mon amitié.

    1. Bonjour Jean-Pascal. Je te remercie. Il faut aussi oser se libérer des carcans de la photographie consensuelle, des règles et des techniques photographiques conventionnelles. Ne pas avoir peur d’être rejeté ou incompris. À très vite !

  2. Avatar de Girard lionel
    Girard lionel

    Voila un univers photographique très intéressant, un style que j apprécie ou le noir et blanc montre son importance et une vision que la couleur ne peut restituer, j’avait vu quelques photographies mais pas plus et je retrouve ce que ci que me fait aimer la photographie .

    Merci du partage

    1. Merci Lionel. C’est un plaisir.

  3. Avatar de Jean-Michel
    Jean-Michel

    Je crois que tout n’est qu’affaire de sensibilité. Je ne connaissais pas Daido Moriyama mais ses images me plaisent assez. Certaines montrent un monde sale et abimé. Et le contraste, les lumières brulée, les noirs bouchés et surtout c’est vrai la texture font ressentir cette crasse et dégradation…

    C’est vrai qu’il est difficile de rentrer dans le monde de Daido Moriyama et tout ne me plais pas.

    Une belle découverte. Merci.

    1. Merci Jean-Michel. Amicalement. Fred

  4. Avatar de DULAS Frédéric
    DULAS Frédéric

    Bonjour Fred : d’abord , merci de me faire découvrir ce photographe ; j’aime bien sa démarche , comme un itinéraire urbain , allant du contraste au brouillard ; il aime bien les contre-jours ;

    Je me sens raccord avec cette vision de la ville , parfois cruelle , sale , violente mais aussi touchante ;

    Pour moi aussi , belle découverte . Merci.

    1. Bonjour Frédéric. Moriyama a produit une quantité incroyable d’images iconiques. Un grand nombre de livres ont été édités.

  5. Merci pour la découverte ! Je ne connaissais pas, mais j’aime ce genre de photos avec un vrai caractère. Je vais creuser un peu plus cet univers !
    Quand au message ou à la démarche qu’un artiste ferait passer, je peux me contenter de la seule l’esthétique d’une image parfois, autant en tant que photographe que comme spectateur, sans y chercher forcement un message.

    1. Bonjour. Il ne faut pas hésiter à fouiller le web car cet auteur mondialement reconnu a réalisé un travail colossal. Tous ses livres ne se valent pas mais il mérite que l’on fasse un détour par chez le libraire pour mieux apprécier son travail. Merci d’être passé ici. A bientôt.

  6. Avatar de Jérôme

    Bonjour à tous 👋. Très bel article sur Moriyama . Pour appréhender sa photographie il faut savoir qu’à la fin des années soixante il a voulu rejoindre le collectif vivo ( composé entre autres d’Hosoe ) avant sa dissolution. Peu de temps après ils ont sorti le magazine Provoke qui a fait scandale car leurs photographies montraient la face sombre des villes avec une jeunesse laissée pour compte. Je pense que Moriyama est nihiliste, il a voulu casser les codes de la photographie japonaise avec sa propre vision qu’on retrouve dans son livre Farwell Photografy par exemple. Pour finir qu’on aime ou pas son travail il reste un photographe incontournable. PS: Fred si tu veux faire un article sur Masahisa Fukase fais moi signe je serais très heureux d’y contribuer.

    1. Bonjour Jérôme. Je te remercie pour ces précisions. Je me demandais justement s’il était bien nécessaire de faire un rapide résumé de son parcours mais apparemment peu de lecteurs ici le connaissaient à mon grand étonnement. Moriyama voulait en finir avec la photographie ou du moins de la notion de photographie ( d’où son livre Farewell ). Il a même été jusqu’à détériorer ses négatifs les rendant presque inutilisables avant de se remettre à photographier. Quand il s’est mis au numérique, il a commencé à produire encore plus d’images qu’avant. Il pouvait prendre 1500 vues sur une journée. Concernant Masahisa Fukase, je te laisserai le soin d’en parler si tu veux. Toi qui lis beaucoup, tu as une meilleure plume que moi. Amicalement.

  7. Avatar de Jérôme
    Jérôme

    Bonjour Fred, oui effectivement Moriyama mitraille beaucoup qu’il juge nécessaire afin de produire des livres ( environ 300 à l’heure actuelle…) . De plus j’ai trouvé différentes sources sur lui qui peuvent intéresser tes lecteurs : le podcast de la MEP : https://podcasts.apple.com/fr/podcast/les-podcasts-de-la-mep/id1547635940?i=1000528647936 et cette vidéo de photosynthèse : https://youtu.be/Y4Q9XgJqLlc?si=BRIJmqmK_RhmXFOy Au plaisir Fred. Amicalement