Quand l’argentique hante vos fichiers RAW
L’argentique ne m’a jamais vraiment quitté. Même si je n’ai plus shooté de pellicule couleur depuis des années, elle continue d’habiter mon regard. À chaque session Lightroom, je me retrouve à comparer mes RAW au souvenir précis d’une émulsion particulière : la Fuji Superia 1600.

Cette pellicule avait quelque chose de spécial. Des tonalités douces, presque pastel. Une saturation contenue qui donnait aux images cette élégance naturelle. Et ce grain si particulier, présent mais jamais agressif, qui structurait l’image sans la parasiter.
Le drame du fichier RAW brut
Parce qu’il faut bien l’avouer : un RAW tout nu, c’est rarement beau. Les couleurs sont livides, les tons chair bizarres, l’image manque cruellement de personnalité. C’est la force ET la faiblesse du numérique – tout est possible, mais rien n’est défini.
Alors je passe des heures à recréer cette palette qui était naturellement présente sur mes films Fuji et Kodak d’autrefois. À retrouver cette douceur, ces transitions de couleurs, ce caractère unique que chaque émulsion possédait.
L’époque bénie du « choisir son film = choisir son style »
Vous vous souvenez ? Avant, c’était tellement plus simple. Vous vouliez des couleurs chaudes ? Kodak Gold. Des tons neutres ? Fuji Pro. Du grain expressif ? Tri-X. Votre choix de pellicule ÉTAIT votre traitement d’image.
Une fois le film terminé, direction le labo. Carmencita, Mori, peu importe. Vous récupériez vos images numérisées ou tirées, et basta. La colorimétrie était là, définie par le film et le processus de développement. Pas besoin de passer trois heures sur Lightroom à ajuster des curseurs à l’infini.

Le piège de l’infini numérique
Aujourd’hui avec mes reflex numériques, je passe un temps fou devant l’écran. Et le pire ? Je ne suis jamais totalement satisfait. Toujours un petit réglage de plus, une courbe à affiner, une teinte à corriger.
Les photographes de mariage qui continuent de shooter en argentique avec des labos comme Carmencita ont compris un truc : le temps gagné en post-production est colossal. Leurs images sortent du labo avec déjà leur identité visuelle. Ils peuvent se concentrer sur la vraie création plutôt que sur la technique.
Mon fantasme d’IA argentique
Tenez-vous bien, parce que venant d’un argenteux pur et dur, ça va vous faire rire : j’attends avec impatience l’IA dans les boîtiers photo.
Oui, vous avez bien lu. Une intelligence artificielle capable d’appliquer directement au déclenchement un profil couleur personnalisé. Genre « rendu Fuji Superia 1600 » ou « look Kodak Portra 400 ». Le JPEG qui sort du boîtier ressemblerait déjà à ce que je veux, sans passer par la case post-traitement.
Le paradoxe est savoureux : un défenseur de l’argentique qui rêve d’une technologie ultra-moderne pour… recréer le fonctionnement de l’argentique. Retour à la case départ, mais avec des électrons à la place des cristaux d’halogénure d’argent.
Nostalgie ou pragmatisme ?
Au fond, ce n’est pas vraiment de la nostalgie. C’est juste que le système argentique avait résolu ce problème depuis longtemps : offrir une identité visuelle cohérente sans post-production chronophage.
Les fabricants de pellicules étaient des coloristes géniaux. Ils avaient compris qu’un photographe a besoin d’un style reconnaissable, d’une signature visuelle. Le choix du film faisait partie intégrante de la démarche créative.
Aujourd’hui en numérique, chacun doit devenir son propre chimiste de labo. Maîtriser la dérawtisation, créer ses profils, peaufiner ses presets… Un métier dans le métier.
Et vous, vous les traquez aussi ?
Ces rendus argentiques qui hantent vos fichiers numériques, vous les recherchez aussi ? Cette Kodak 200 UC aux couleurs pétantes, cette Ilford HP5+ au grain si reconnaissable, cette fameuse Fuji 1600 aux tons doux…
Dites-moi en commentaire quelle pellicule vous essayez désespérément de recréer en numérique. On n’est jamais seuls dans sa nostalgie !

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